dimanche 25 septembre 2011

Conversation avec un chat

Ce matin, comme à mon habitude, je prends mon café au lait sur le balcon avant. Le deuxième fauteuil « Adirondack » est occupé par un chat, un tigré européen fumant paisiblement sa cigarette, tout à son aise, très gentleman, costard à larges rayures, chaussures italiennes, lunettes « Armani », bref, un type bien. C’est lui qui engage la conversation.

« La cigarette ne vous importune pas, j’espère? »

Je n’ai pas même le temps de formuler ma réponse que le voilà qui me tend son paquet : des « Gauloises blondes », ma marque de prédilection.


« Vous permettez ? », dit-il, en brandissant son briquet sous mon nez, avec cette belle assurance de ceux qui ont eu le bonheur, à leur naissance, de voir se pencher sur leur berceau la fée du Rien-ni-personne-ne-pourra-vous-résister.


Je tire lentement sur la cigarette, en pensant que James Bond lui-même ou Clint Eastwood en personne ne seraient pas plus irrésistibles, réalisant du coup que je n’ai pas encore prononcé le moindre mot. Les yeux rivés sur sa montre « Raymond Weil », je ne puis m’empêcher de penser au lapin dans « Alice au pays des merveilles ».

« Je ne suis pas sortie de ma nuit, Annie Ernaux, vous connaissez? », que je lui demande, surpris moi-même d’une telle présence d’esprit à pareille heure.

— Sachez, monsieur, que non seulement, la nuit, tous les chats sont gris, mais que de tous les animaux qui peuplent la terre, les chats, sans exception aucune, vouent un culte idolâtre à l’auteur de Passion simple, de La femme gelée, de L’Évènement et de L’usage de la photo. »

J’étais bouche bée. J’ai toussé deux trois bons coups pour me donner une contenance, j’ai éteint ma cigarette, puis j’ai prétexté une envie impérieuse d’uriner. Je suis rentré sans demander mon reste.


En remuant ma litière, je repensais à notre conversation.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire