jeudi 27 février 2014

Je manque de rose






Je manque de rose, c’est une forme d’anémie : une anémie de l’esprit, une maladie de poète. À une autre époque, on appelait cela « le mal du siècle », une maladie de l’âme qui s’apparente à l’atonie. Les psychologues vous diront que vous souffrez d’apragmatisme ; en fait, cela veut dire que vous êtes tout simplement morose, c’est-à-dire en mal de rose.

En général, la vie manque de rose. Je parle du rose, de la couleur, non de la fleur ; je parle de l’absence de couleur, je parle du syndrome post-Saint-Valentin. Je m’adresse aux suicidaires de février, en mal de rose, en manque de rose.

Je dis à tous les névrosés de février de ne jamais perdre espoir, car le rose, il arrive même qu’il finisse par pleuvoir ! Il ne s’agit pas de voir la vie en rose : il s’agit tout simplement d’espérer le rose, de l’attendre. C’est une erreur de penser que le vert est la couleur de l’espérance ; c’est une erreur de croire que le blanc est le contraire du noir. L’espoir est rose, c’est une vérité de La Palice.

Le ciel devrait être rose, même quand il pleut ; c’est ce que je me dis quand je pense à un ami qui m’appelle pour me dire qu’il veut mourir. Alors je me mets à rêver à cette « pluie de roses » que nous annonce sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, poète extatique du rose absolu. Certains jours, moi, je voudrais y croire.

En général, le monde m’ennuie : il manque de couleurs, de fleurs, de poètes, et d’enfants assez fous pour croire que les roses, oui, elles peuvent pleuvoir!