Les funérailles d'Atala, 1808
Anne-Louis Girodet (1767-1824) |
Le ciel s’obscurcit, le vent se
lève, dans le vague amer des passions mortes dans l’œuf et dans un atermoiement
de moi-même qui frôle l’hystérie, j’assiste, impuissant, presque indifférent, à
la mort de l’été.
En attendant l’orage, je flirte
avec Chateaubriand : « Levez-vous vite, orages désirés… ». J’’entends
Baudelaire, la voix rauque, l’œil fou, le sourire malade : « Quand le
ciel bas et lourd pèse comme un couvercle. » J’attends qu’il pleuve pour
savoir si je suis encore capable de pleurer.
Comme une envie soudaine,
impérative, inexpliquée et absurde de peler des pommes de terre pour rien avec un
perroquet vert sur l’épaule qui me sifflerait à l’oreille une chanson triste d’Alice
Robi.
L’envie de faire une sieste de
cent ans avec la Belle au bois dormant, de ne plus écrire, jamais, une envie d’allégeance
totale au désespoir.
L’envie de dessiner une maison
avec une porte et une fenêtre au-dessus, un soleil pâle à droite, et un pendu à
l’intérieur.
L’envie de relire à genoux Confessions d’une religieuse de Sœur
Emmanuelle, d’acheter un poisson rouge, une roulotte (?), de faire exploser le
barbecue, de creuser la terre pour y dénicher des vers, une envie de tintamarre
comme de jouer de la casserole en pleine nuit.
Une envie urgente de me confesser
à Annie Ernaux, une envie sauvage de romantisme débridé : embrasser à
pleine bouche le voisin d’à côté qui me salue tous les matins vers 6 heures, si
beau avec sa barbe de trois jours.
Une envie de tricoter des « pattes »
de bébé, de faire semblant de lire À la
recherche du temps perdu, une envie de prendre le voile, l’envie de faire
brûler un poulet par exprès, de renverser de la mélasse sur le tapis blanc de
la chambre de ma tante Gertrude, l’envie de relire à la suite tous les romans d’Amélie
Nothomb les yeux fermés, l’envie d’aller fleurir la tombe de Gaston Miron,
l’envie folle d’un éléphanteau comme animal de compagnie, l’envie d’écouter en
boucle « Breathe » de Pink Floyd, comme une envie de me rallier à
l’idée que le Québec ne deviendra jamais un pays, l’envie de me faire tatouer un
petit bonhomme Pillsbury sur le torse, de crever des pneus au hasard dans la
rue, de me « moucher dans les étoiles », de sniffer de la colle à
faux cils…
Oui, beaucoup de mal à l’idée qu’il faille déjà enterrer
l’été.
J'ajouterais: envie de faire un autodafé avec les dissertations et danser autour en mangeant ton poulet brûlé et des petits pains Pillsburry, avec la mélasse récupérée du tapis. Et se dire que l'été dormira un peu avant de REVENIR. ta jojo
RépondreSupprimerJolyne: Quelle bonne idée que cet autodafé de dissertations! On se croirait dans un roman de Boris Vian. Ou d'Amélie Nothomb. Merci.
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