Pourquoi j’aime Amélie Nothomb?
Parce qu’elle est la seule, à ma connaissance, à écrire des phrases impossibles,
improbables, impayables, des phrases que personne d’autre qu’elle ne peut
écrire, parce que c’est cela, justement, écrire, c’est s’approprier le langage,
le réinventer, comme si vous étiez le seul à pouvoir le faire, comme si vous
étiez le premier. Nothomb, c’est ça : une langue, un style, une manière
bien à elle, et puis ce petit je-ne-sais-quoi de fallacieux dans le propos, sa
marque de commerce, qui nous la fait aimer ou détester, c’est selon :
« Le trafic des indulgences
a soulagé bien des problèmes digestifs. » (p.28)
« J’ai une passion
théologique pour les œufs. » (p.32)
« L’inventeur du champagne
rosé a réussi le contraire de la quête des alchimistes : il a transformé
l’or en grenadine. » (p.59)
« Je suis pour le retour de
la fraise espagnole, il n’y a pas plus seyant. » (p.84)
« Mon ambition était de
devenir un œuf. » (p.89)
« Vous ressemblez à une
asperge. Vous êtes longue et mince, votre parfum n’en évoque aucun autre, et
rien sur terre n’égale l’excellence de votre tête. » (p.106)
« … véritable pyrotechnie
d’organdi. » (p.84)
« … apicultrice
intergalactique. » (p.166)
Humour belge? Poésie surréaliste?
Qui peut se vanter d’en faire autant?
Amélie est à la métaphysique
absurde ce que Jean de la Croix est au mysticisme chrétien : la même folie
grandiloquente, la même exaltation délirante.
Mythomanie perverse, rodomontade
de mauvais goût diront ses détracteurs.
Dans Barbe bleue[1],
le dernier opus de madame Nothomb, le génie frôle Amélie. Encore une fois.
À quand le retour de la fraise
espagnole?
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