Je suis
comme un flamant rose qui volerait à l’envers, la tête en bas, un Jonathan Livingston
du suicide, une hirondelle kamikaze, un héron bleu de désespoir, le plus noir
des poèmes de Baudelaire. Je suis aussi triste que Colin dans L’Écume des jours après la mort de Chloé.
Je pense à
mon frère qui aimait tant les chiens, le printemps, le champagne et le saumon
fumé.
Je revois ma
perruche (se posant une dernière fois sur mon épaule pour me dire « je t’aime »,
avant de tomber raide morte sur le carrelage de la cuisine).
Diane Dufresne qui chante « L’été n’aura qu’un jour »; le macaroni à la viande, au
fromage et à l’amour que ma mère nous concoctait le samedi, si réconfortant; la
vénération obsessionnelle de mon oncle alcoolique pour Édith Piaf; la fierté de
ma petite-nièce Coco, posant dans son tutu rose et son collant blanc, trop
fière, trop belle : comment m’en remettre?
Le Cri de Munch; ma sœur caressant les doigts jaunes
de son mari sur son lit de mort; le bleu de mes hortensias plus bleus qu’un ciel
de mai; ma chatte Annie, le ventre ouvert, venue me faire ses derniers adieux sur
le pas de ma porte : comment oublier?
Le goût âcre
du café noir et la première cigarette du matin après une nuit de beuverie; le
suicide de mon ami d’enfance le jour de ses trente ans dans le garage de ses
parents; « Le Mal de vivre » de Barbara, un jour de pluie; en octobre; Manuscrits de Pauline Archange, de
Marie-Claire Blais : je ne pourrai jamais quitter ce monde sans pleurs.
Je regarde le
ciel en pensant au jour où je rejoindrai Baudelaire dans un quelconque paradis, artificiel ou non.
Très « dark side of the moon », je regarde défiler les nuages depuis plus d’une
heure.
Je mourrai pour
avoir trop aimé le soleil, et l’accordéon.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire